Interview d'Ericka Weidmann, 9Lives-Magazine.com
Découvrez notre entretien inédit avec Ericka Weidmann, la fondatrice du magazine en ligne 9 Lives et de sa newsletter consacrée au monde de l’image et de la photographie. Tout savoir sur ce média qui monte en puissance lancé il y a à peine deux ans !
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A quand remonte le lancement de votre média ?
J’ai lancé le site et la newsletter en septembre 2018. 9 Lives va donc souffler ses deux bougies à la rentrée prochaine !
Pourquoi avez-vous eu envie de créer un quotidien du monde de la photo ?
C’est le fruit de presque vingt ans d’expérience dans le domaine de la presse consacrée à la photographie. J’avais besoin de créer un média libre et indépendant ! J’avais également envie de donner la parole aux gens. C’est pour cela que nous accueillons chaque semaine un·e invité·e, un peu à la manière d’un rédacteur en chef invité. Du lundi au vendredi nous lui laissons carte blanche.
A qui s’adresse 9 Lives ?
Nous nous adressons au secteur professionnel de la photographie. Tous métiers et tous genres confondus, du photojournalisme à la photographie plasticienne. Notre public est composé de photographes, mais surtout de professionnels comme les commissaires d’exposition, les directeurs artistiques, les éditeurs, les journalistes…
Quel est l’enjeu lié à la culture de l’image photographique aujourd’hui ?
À l’heure où tout le monde photographie, publie et partage des images, il est crucial d’apporter aux lecteurs les informations autour du respect du droit d’auteur… Le secteur de la photographie est fragile et souffre d’une énorme précarisation. Nous devons défendre le métier ! La photographie est devenue un axe de communication important, 9 Lives est également là pour décrypter l’actualité photographique à travers des articles de fonds, brèves et interviews.
Avez-vous interrompu votre newsletter pendant l’état d’urgence du coronavirus ?
Bien au contraire ! Depuis la mi-mars, nous avons rédigé plus de 160 articles liés à la crise et nous avons doublé notre lectorat. Le confinement a participé à une « consommation » plus importante de l’information digitale. La période de cette crise sanitaire a donc été particulièrement chargée car nous avons souhaité donner la parole aux professionnels. Nous avons réalisé un très grand nombre d’interviews pour décrypter au mieux l’impact que cette crise a généré dans notre secteur. Nous avons également souhaité être très réactifs pour informer au mieux les professionnels sur la situation en mettant à jour les différentes aides annoncées par le gouvernement mais aussi par les différentes structures dédiées. Il a également été important d’être un relai pour les organisations syndicales et professionnelles qui se sont battues pour que les photographes reçoivent des aides exceptionnelles.
Quelle place occupe votre newsletter par rapport à vos réseaux sociaux ?
En dehors du site, la newsletter est notre canal privilégié. Le contenu publié sur les réseaux sociaux est le même. J’avoue ne pas avoir trop le temps (à tort d’ailleurs) pour mettre en œuvre une stratégie spécifique. Cela est terriblement chronophage. Malgré cela, 32 % du trafic provient des réseaux sociaux (contre 29 % en provenance de la newsletter).
Combien avez-vous d’abonnés à vos emailings ?
Nous avons 6 600 abonnés actifs et le format quotidien représente les 2/3 des abonnements (le lectorat étant majoritairement professionnel il est donc logique qu’il ait besoin d’être informé chaque jour du lundi au vendredi). Mais en réalité nous avons un listing presque trois fois plus importants…
C’est-à-dire ?
Régulièrement je fais un énorme nettoyage dans mes abonnés, cela peut paraître radical, mais je supprime tous ceux qui n’ont pas lu la newsletter sur les trois derniers mois. Je préfère avoir moins d’abonnés, mais plus qualitatifs. Ainsi, pour l’édition best of du week-end qui est très suivie, le taux d’ouverture est de 90 % en moyenne (contre 45 % pour la quotidienne).
90 % c’est un taux d’ouverture exceptionnel !!
Je dois dire qu’une fois mon compte avait été bloqué par MailChimp, j’avais trop d’erreurs et de retour d’emails invalides ! C’est pourquoi depuis un an je fais un nettoyage drastique, j’espère avoir ainsi amélioré ma « réputation d’expéditeur ».
Pourquoi avoir choisi MailChimp comme prestataire ?
Cela fait des années que je j’utilise cette plateforme emailing ! J’en ai testé une ou deux autres, mais comme j’envoie beaucoup d’e-mails chaque jour, la facturation au nombre d’abonnés et non à l’envoi par exemple est plus intéressante financièrement. Et je trouve l’interface hyper pratique. Les soucis sont rares chez eux… et pourtant depuis 2013 j’envoie une newsletter tous les jours !
Est-ce que le template de votre newsletter provient également de MailChimp ?
Non, j’ai entièrement conçu le design. C’est quelques jours de travail, mais j’ai créé quelque chose qui correspond à ce que j’aime recevoir personnellement. Des grandes images, un peu de texte pour donner envie d’aller plus loin… Pas trop court, pas trop long (sauf pour l'édition hebdo). L’essentielle de l’information doit être facile et rapide à trouver.
Quel est le principe de l'indication du temps de lecture présent à la fois sur le site et sur la newsletter ?
Il s’agit d’un simple code à ajouter pour le site (WordPress). C’est essentiel d’indiquer au lecteur le durée moyenne de lecture d’un article. Cela peut lui permettre de lire de suite ou de le mettre dans ses bookmarks pour le lire plus tard si c’est un article ou une enquête qui demande plus de temps de lecture.
Pourquoi avoir choisi le rythme de publication quotidien ? Est-ce compliqué à gérer ?
Le format hebdo ne permet pas d’assurer la réactivité qu’offre le web. En 8 jours, il peut se passer tellement de choses… Avant je gérais ma newsletter via des flux RSS, cela a ses avantages et ses inconvénients. J’ai arrêté depuis, cela me prend un peu plus de temps, mais cela m’assure d’avoir le résultat escompté. J’essaie de mutualiser mes actions pour optimiser mon temps. J’ai plein de défaut, je suis une piètre commerciale, atroce pour le marketing, mais l’un de mes points forts c’est l’organisation et la gestion du temps. L’édition hebdo est générée après les quotidiennes, je dirais que ça me prend 10 à 15 minutes. Pour la newsletter quotidienne, c’est plus long, parce qu’en même temps je programme les réseaux sociaux. Pour les cinq jours, cela me prend environ 3 à 4 heures.
Vos emailings sont-ils préparés en amont ? Avez-vous une règle pour l’heure d’envoi ?
Généralement les newsletters sont préparées le week-end pour toute la semaine à venir (de la veille pour le lendemain, voire le jour-même, dans de très rares occasions). S’il y a des actualités à ajouter, je le fais par la suite en rééditant les fichiers… Comme je publie tout au long de la journée, je voulais que les lecteurs reçoivent l’intégralité du contenu du jour chaque soir. Je me suis dit que 22 h était une bonne heure, entre la fin du boulot et le couché. Beaucoup de lecteurs apprécient ce timing.
Vous publiez combien d’articles par semaine ?
Chaque jour nous publions :
- Une éphéméride - contenu court alliant info brute et parfois décalée,
- Une carte blanche de l’invité·e,
- Une news - chaque jour rédaction d’une actualité,
- Un article - sous la forme suivante : le lundi une interview, le mardi un ouvrage, le mercredi une expo ou un festival, le jeudi un appel à candidature et le vendredi un portfolio (le fait d’avoir un contenu dédié par jour permet au lecteur de savoir ce qu’il va retrouver),
- Un article sur l’art contemporain.
Ce qui fait donc 25 articles par semaine. À la newsletter quotidienne et ses 5 articles s’ajoute également l’expo du jour (Agenda) et la reprise d’une archive (publiée les années précédentes). L’agenda est très prisé, cela apporte un trafic important.
Est-ce que vous êtes seule pour gérer et animer 9 Lives ?
J’ai créé le site et je suis en charge de tout le contenu éditorial – sauf pour la partie Art Contemporain intégralement gérée par Marie-Elisabeth de la Fresnaye. Donc je rédige, je fais la mise en ligne et je m’occupe de la newsletter et des partages sur les réseaux sociaux. Certains contributeurs participent à la rédaction de façon ponctuelle comme Pascal Therme ou encore Carine Dolek par exemple…
Votre média est entièrement gratuit et sans publicité, pour quelle raison ?!
Concilier indépendance et monétisation c’est le nerf de la guerre… Je parle avec mes 20 ans d’expérience. J’ai été maintes fois contraintes de publier du contenu ou de me censurer à cause d’un annonceur ou d’un investisseur. Ceci dit, j’en appelle à vos lecteurs, dont l’un serait peut-être philanthrope et souhaiterait financer un média sans interférer dans le contenu éditorial.
Aujourd’hui les tarifs publicitaires sont tellement bas, qu’il serait impossible d’en vivre. Quand on connait le taux de conversion d’une version payante, ce n’est pas encourageant. On fait ce métier pour que l’information soit la plus lue possible et les gens ne sont pas encore prêts pour payer pour obtenir de l’information au format numérique. C’est peut-être trop tôt. Inutile de faire une étude de marché poussée. Demander à dix de vos amis s’ils sont abonnés à un média, vous serez surpris du résultat. Et imaginer donc pour un média spécialisé…
Quel bilan faites-vous de cette aventure ?
Passionnant ! Nous avons enregistré une augmentation de 10 % des abonnements au cours des deux derniers mois. Et avoir doublé le lectorat sur le premier semestre 2020 prouve qu’il y a un besoin, et que le travail fourni a une réelle utilité (or ce qui n’est pas tous les jours facile à prouver dans le secteur culturel, nous vivons tous avec des doutes de ce côté-là).
Avez-vous des idées d’évolution ?
J’aimerais développer 9 Lives avec plus de contributeurs, avec des budgets pour avoir le temps de réaliser des enquêtes plus approfondies. Mais c’est difficile. La problématique financière est toujours la même et pour tout le monde. J’ai peut-être une petite idée de financement, au moins pour que tous les frais soient amortis, à voir en septembre prochain ! Dans l’idéal, j’aimerais également automatiser plus de choses pour la newsletter, avoir du contenu à la carte qui soit plus personnalisé pour les abonné·es… Il faut du temps pour se pencher dessus et gérer un quotidien qui ne laisse que très peu de temps à la réflexion de refonte et d’évolution.
Quels sont les secrets d’une stratégie newsletter réussie selon vous ?
Je ne peux pas parler de stratégie. Aujourd’hui l’essentiel du succès de 9 Lives réside dans son contenu. C’est pour cela que les gens s’abonnent ! Pour moi il est crucial que je sois sûre que le contenu intéresse les destinataires. J’ai mis de côté toute la partie business, je parle aux gens, c’est un dialogue entre des passionnés et une passionnée.
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Publié le 25-06-2020
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